Crédit d’impôt et fonds social

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CONSTAT

Les comptes des collectivités publiques genevoises (canton et communes) pour l’exercice écoulé (2022) seront largement excédentaires, pour la troisième année consécutive. Cette année, ce ne seraient pas moins de 1,3 milliard pour le canton, selon diverses fuites dans la presse. Cela signifie que les recettes fiscales devraient excéder de quelque 1,7 milliard les revenus anticipés au budget. A l’échelon des communes, on peut également anticiper des revenus supérieurs d’environ 450 millions aux prévisions budgétaires. Soit 2,2 milliards au total qui seraient annoncés à la fin du mois de mars. Ce montant s’ajoute à celui de l’année 2021 (1 milliard pour le canton).

Face à cette situation, les camps politiques traditionnels proposent des approches classiques consistant, dans les grandes lignes, pour la gauche à une augmentation de postes à l’État sans qu’on sache si ces postes sont réellement alloués à des besoins de terrain identifiés, et pour la droite en baisses d’impôt ciblées sur certaines catégories de personnes physiques (baisse de l’impôt sur le revenu, création ou augmentation de déductions) ou des personnes.

Techniquement, ces excédents de recettes sont portés aux fonds propres des collectivités visées, soit en diminution de la dette dans le cas du Canton de Genève. En effet, une fois constituées les provisions ordinaires et extraordinaires, une fois la réserve conjoncturelle dotée, le Grand Conseil doit prendre acte des comptes et clore l’exercice budgétaire écoulé sans possibilité de réattribuer les excédents. Il est toutefois probable que ceux-ci se reproduisent, en partie au moins, dans l’exercice en cours.

Plusieurs segments de la population ont ainsi le sentiment d’être oubliés dans la redistribution de richesses générées par une croissante à laquelle ils contribuent pourtant et dont ils subissent aussi les effets parfois mal maîtrisés. Par la constitution d’un nouveau « fonds social », il s’agit de rappeler que la société s’articule sur les notions de contribution fiscale et de redistribution sociale, toutes deux ayant pour corollaire le revenu net disponible – ou pouvoir d’achat réel – des citoyen.ne.s.

MESURE

On introduit le principe d’une rétrocession aux habitant.e.s, sous la forme d’un crédit d’impôt, de la moitié des revenus fiscaux non anticipés. Ainsi, au moment de la publication des comptes, ces montants doivent être portés en diminution du bénéfice et portés au bilan comme passif transitoire, avant d’être reversés à la population. Pour le premier exercice (2023) cette charge ne pouvant être inscrite a posteriori dans les comptes 2022, on constitue un fonds social doté à hauteur de la moitié des recettes exceptionnelles de l’exercice précédent du canton et des communes. Cette somme sera comptabilisée sur l’exercice 2023. Les collectivités restent libres d’affecter la seconde moitié de leur excédent de recettes à diverses provisions, dotation de réserve conjoncturelle ou amortissements complémentaires (communes).

Ce fonds est restitué à la population résidente sous forme de crédit d’impôt par habitant.e (per capita), sans limite d’âge ni de lien avec la capacité contributive, non imposable et non pris en considération dans le RDU (inclus dans les exonérations sociales de l’art. 27 LIPP et dans les déductions de l’art. 5 LRDU).

Ce crédit social, qui est techniquement un crédit d’impôt, est crédité sur les comptes d’impôt pour l’année en cours lorsque les comptes laissent apparaître des revenus exceptionnels. Pour 2023, sur la base des estimations ci-dessus (2,15 milliards), et représente environ CHF 2’000.- par tête, respectivement il est crédité sur les comptes des personnes non imposées, sous déduction d’éventuelles poursuites. Pour une famille de 5 personnes, cela représentera CHF 10’000.-.

ARGUMENT 1 – Quoi ?

L’enjeu réside dans la capacité de redistribuer, sans se lier par exemple par une baisse de taux d’impôt fixée durablement dans la loi ou par l’engagement de personnel public sans connaître l’allocation exacte, une part des fruits de la croissance genevoise.

ARGUMENT 2 – Pourquoi ?

Le pouvoir d’achat s’amenuise inexorablement. Ce chantier, avec ses déclinaisons dans les domaines du logement, de la santé et du travail, sera celui de la prochaine législature, avec des profonds changements structurels à la clé. Dans l’intervalle, il est important de donner de l’oxygène aux Genevoises et aux Genevois, sur une base égalitaire.

ARGUMENT 3 – Comment ?

A l’image de ce qui s’était fait à Genève au tournant des années 2000 pour atténuer la perte de pouvoir d’achat des rentiers AVS, les cantons peuvent introduire une forme de déduction sociale temporaire et égalitaire, dans le cadre de la Loi fédérale sur l’imposition des personnes physiques ; cette formule initiée par Micheline Calmy-Rey, alors ministre genevoise des finances, avait convaincu une majorité politique et n’avait pas fait l’objet de recours judiciaire, à l’époque.